Le FoMO : comprendre l’anxiété de ratage et ses effets sur le bien-être

Le Fear of Missing Out (FoMO), ou « anxiété de ratage » en français, est un phénomène psychologique de plus en plus courant en raison de notre utilisation du numérique. Le FoMO se manifeste par une peur ou un stress à l’idée que d’autres vivent des expériences enrichissantes dont on serait exclu·e. Ce sentiment, souvent amplifié par l’usage des réseaux sociaux, peut avoir des répercussions importantes sur la santé mentale, les relations sociales et la satisfaction de vie.
Des impacts bien réels sur la santé psychologique
Les études récentes démontrent que le FoMO affecte négativement le bien-être psychologique et social des jeunes adultes. Plus une personne ressent du FoMO, plus elle est susceptible d’éprouver de l’anxiété, du stress ou encore des symptômes dépressifs (Semarajana et al., 2024). Le FoMO est également lié à une diminution de l’estime de soi et du bien-être subjectif. Selon la science, ce phénomène est particulièrement marqué chez les membres de la génération Z, fortement engagés sur les réseaux sociaux (Chakrabarti, 2024).
Sur le plan social, le FoMO affecterait négativement le sentiment d’appartenance sociale et la satisfaction de vie. Il est associé à des sentiments d’exclusion et à l’impression de ne pas être à la hauteur, notamment chez les personnes ayant tendance à comparer leurs expériences à celles mises en scène par autrui sur les plateformes numériques (Littman‐Ovadia & Russo‐Netzer, 2024). Ce mécanisme de comparaison sociale contribue à une baisse du bien-être général, comme le montre une corrélation négative entre FoMO et satisfaction de vie chez les jeunes adultes (Prabowo & Dewi, 2021). La connectivité constante accentue ce sentiment de manque, car les utilisateur·trice·s sont continuellement exposé·e·s aux expériences des autres (Vemuri, 2024).
Comment éviter que le FoMO nous affecte ?
Pour réduire le FoMO, plusieurs pistes d’action sont envisageables, tant au niveau individuel que dans notre rapport aux contenus que nous consommons en ligne. Il ne s’agit pas nécessairement de diminuer le temps passé sur les réseaux, mais surtout d’agir sur notre manière d’y être présent·e.
Voici quelques stratégies concrètes :
Développer la patience et l’autocontrôle
Ces compétences aident à mieux gérer les pensées et émotions liées à l’usage des réseaux sociaux. Une étude a montré que le fait de travailler sur le développement de la patience peut réduire significativement le FoMO chez les utilisateur·trice·s d’Instagram (Pratiwi & Supriatna, 2024). Cela peut passer par des pratiques comme la pleine conscience, la respiration consciente ou encore l’entraînement à différer les gratifications (ex. : retarder volontairement la consultation d’une notification ou l’ouverture d’une application).
Pratiquer la déconnexion numérique
Intégrer des pauses régulières loin des écrans et restructurer ses habitudes peut apaiser le besoin de rester connecté·e constamment. Cela permet de prendre du recul et de retrouver un sentiment d’autonomie face à notre utilisation du numérique (Yıldırımer & Yentür, 2024).
Renforcer le soutien social
Travailler son réseau et s’entourer de relations significatives contribue à satisfaire nos besoins psychologiques fondamentaux. Les personnes qui tendent à entretenir leur cercle social et qui maintiennent des relations authentiques sont moins susceptibles de ressentir du FoMO (Dou et al., 2021).
Prendre conscience des comparaisons sociales
Observer les moments où l’on se compare aux autres en ligne peut être un point de départ pour réfléchir aux actions à poser vis-à-vis de ce contenu. Des pistes concrètes peuvent inclure :
- désactiver les notifications de certaines applications,
- suivre des comptes qui valorisent l’authenticité,
- ou encore prioriser du contenu qui fait du bien et qui n’engage pas la comparaison.
Ces changements, bien que simples, peuvent avoir un impact significatif sur le bien-être numérique.
Les plateformes comme catalyseurs de FoMO
Les plateformes de réseaux sociaux jouent un rôle central dans notre expérience du FoMO. Conçues pour capter et retenir notre attention, elles exploitent des mécanismes psychologiques — dont le FoMO — pour nous inciter à rester connectés le plus longtemps possible. Elles favorisent la connexion constante et exposent les utilisateur·trice·s à des contenus soigneusement sélectionnés, ce qui encourage la comparaison sociale et alimente un sentiment d’inadéquation (Yıldırımer & Yentür, 2024 ; Chakrabarti, 2024).
Ces plateformes alimentent également le besoin de maintenir une présence en ligne et de ne rien manquer, ce qui peut nous pousser à les consulter plus fréquemment qu’on ne le souhaiterait réellement, par crainte de passer à côté de quelque chose (Bekman, 2022). Cette architecture persuasive invite donc à la vigilance : il devient essentiel d’adopter une utilisation consciente des réseaux sociaux, en portant attention aux émotions et aux pensées qui émergent lorsque nous faisons défiler les contenus.
En prenant conscience de ces dynamiques, il devient possible de poser des choix plus éclairés : modérer son temps d’écran, ajuster ses paramètres d’algorithme ou encore suivre des comptes qui valorisent l’authenticité et réduisent la pression sociale. Une telle posture permet de transformer notre rapport aux réseaux sociaux pour en faire un espace plus sain, aligné avec notre bien-être.
Vers un usage plus conscient des réseaux sociaux
Plutôt que de viser une déconnexion totale des réseaux sociaux, ou de culpabiliser leur usage, il s’agit de mieux comprendre les mécanismes qui influencent nos comportements numériques. Le FoMO est une réaction humaine et compréhensible dans un monde ultra-connecté. En adoptant une approche bienveillante et informée, chacun·e peut explorer des moyens de se réapproprier son expérience en ligne, de cultiver une relation plus équilibrée aux écrans et de favoriser son bien-être numérique, un pas à la fois.
Références
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